La réforme de l’apprentissage bouscule les CFA, voici les risques et les enjeux qu’ils vont devoir relever pour réussir les défis qu’ils les attendent.

Au niveau de l’apprentissage, la loi qui est examinée au Parlement bouscule complètement les repères :

  • financement au contrat d’apprentissage + complément territorial et sectoriel
  • simplification pour les entreprises
  • pilotage par la qualité centrée sur le besoin de l’entreprise
  • gouvernance assurée par les branches et France Compétence

Elle change le positionnement des professionnels de la pédagogie par alternance. Elle centre l’apprentissage sur les besoins des entreprises et sur la perception de la qualité par les jeunes et leurs familles.

Un financement à la performance ancré dans les territoires

Initialement financé par la taxe d’apprentissage, les subventions régionales et les complétements de certaines branches professionnelles, les CFA vont être maintenant financés au contrat d’apprentissage. Un contrat signé = un financement. Celui-ci sera calculé sur le coût moyen de formation (le coût plancher) décidé préalablement par France Compétence.

La taxe d’apprentissage fusionne avec la contribution formation pour devenir une contribution unique récoltée par l’URSSAF.    

La loi promet à toutes les entreprises de financer la formation d’un jeune en contrat d’apprentissage. Si une branche venait à manquer de financement, un fond de péréquation permettrait de compléter.

Au niveau de l’apprentissage,  l’enveloppe financière sera partagée entre :

  • la Caisse des Dépôts et de Consignations qui gérera “le coût plancher”
  • les opérateurs de compétences OPCO (créés pour remplacer les OPCA)
  • et les Régions

Les CFA pourront signer des Conventions d’objectifs et de moyens (COM) avec les OPCO et les Régions. Ces derniers compléteront le coût moyen de formation en fonction des besoins de la branche ( représenté par l’OPCO) ou/et en fonction des enjeux des territoires (représenté par les Régions). Un CFA pourra signer plusieurs COM avec plusieurs OPCO.

Dans le cadre de son financement, le centre de formation d’apprentis devient une personnalité juridique indépendante (équivalent à un centre de formation) et ne pourra plus être confondu avec son organisme gestionnaire. Une comptabilité analytique fine devient donc ici obligatoire.

Ouverture à la concurrence

Il ne sera plus obligatoire de demander l’accord des régions pour ouvrir un CFA. Les acteurs en place, vont donc voir leurs offres de formation concurrencées par de nouveaux centres qui seront ouverts par des   entreprises, des écoles ou des branches professionnelles.

La région ne sera plus un régulateur ou un pilote de l’apprentissage. Les CFA n’auront plus à rendre des comptes à des fonctionnaires mais directement à leurs “clients” : les jeunes et les entreprises.

Performance et Qualité pour sécuriser les financements

Les CFA devront se faire certifier par un organisme reconnu par le COFRA. Les critères qualité n’ont pas encore été établis. S’ils suivent le sens de la loi, ils devront être axés sur la réponse par les organismes aux besoins des entreprises et des jeunes.

Les acteurs de l’apprentissage devront très sérieusement travailler sur la lutte contre les ruptures de contrat d’apprentissage qui touchera directement leur portefeuille ( si la rupture arrive trop tôt, le CFA risque de ne pas être financé).

Quant on sait que le taux de rupture de contrat est en moyenne autour des 28 % aujourd’hui en France, l’enjeu pour les acteurs va être d’évoluer rapidement dans leurs pratiques d’accompagnement et leurs pratiques pédagogiques.

La qualité des accompagnements est donc clairement le nouvel enjeu central de l’apprentissage. Le financement au contrat oblige à se concentrer sur la conquête et la fidélisation des jeunes et des entreprises.

Les chargés de relations entreprises ou les développeurs vont voir leur métier évoluer. Jusqu’à ce jour concentrés une partie de leur année sur la récolte de la taxe d’apprentissage, ils seront sûrement une des clés du nouvel accompagnement individuel et obligatoire proposé par les CFA.

Les formateurs vont devoir évoluer et apprendre à individualiser leur formation en prenant en compte les besoins à court terme des entreprises.

L’accompagnement garantit le financement au contrat s’il est capable de transformer la posture des jeunes et s’il accélère leur montée en compétences. Il offre en même temps aux OPCO un critère pour prioriser leurs financements car il est le seul à pouvoir réellement répondre aux besoins des entreprises et des jeunes.

Cette réforme oblige les CFA à revoir leur fonctionnement et leur positionnement. Les équipes de direction vont devoir construire de nouveaux projets stratégiques en prenant en compte ces nouveaux enjeux.

Cela va nécessiter une réorganisation des équipes, une évolution des métiers dans les CFA ( formateurs, développeurs, chargés de relations entreprises, chargés de formation…) centrée sur la satisfaction des réponses apportées aux jeunes et aux entreprises.

Dans ce contexte, les CFA devront conduire le changement et travailler à la définition d’un nouveau projet stratégique.